Helmut Froeyman 31.03.2025
Ils étaient 65 Belges à participer à la 41e édition de Cappelle La Grande. Si elle avait eu lieu pendant les vacances de printemps, il y en aurait certainement eu beaucoup plus. Cappelle La Grande se trouve à moins de 10 km de la frontière belge et constitue donc un élément important du calendrier échiquéen belge depuis de nombreuses années.
La première fois que j’ai participé en 2005, j’ai fait la navette entre le domicile de mes parents à Roulers et le lieu du jeu. Beaucoup de Flamands occidentaux font de même, ce qui permet d’éviter les frais d’hôtel. Une deuxième fois, en 2020, j’ai loué un petit appartement à De Panne. Ce n’est qu’à 25 km de la salle de jeu. Cette année, j’ai opté pour l’hôtel à petit budget Campanille à Cappelle La Grande. Avec le temps d’attente réduit à une demi-heure, j’ai trouvé cela à la fois plus agréable et plus raisonnable. Certains participants qui sont restés plus loin ne sont pas arrivés à temps dans la salle de jeu pour une partie et se sont donc vu imposer un forfait. Cappelle La Grande est un petit village français de 8 000 habitants. Si tu veux combiner échecs et tourisme, ce n’est pas le bon endroit. Il n’y a rien à faire à part jouer aux échecs et rien à voir. La mer est toute proche, mais seuls les vrais chasseurs de tempêtes vont se promener à ce moment-là. Il a même neigé pendant un moment, alors j’ai perdu du temps à glacer les vitres de ma voiture. D’ailleurs, une voiture, c’est pratique, mais avec un peu de patience, tu peux utiliser le bus gratuitement dans toute la région.
Chaque tournoi a son atmosphère particulière et cela s’applique certainement aussi à cet open. Tout d’abord, c’est l’un des derniers plus grands opens d’Europe où tout le monde joue en 1 groupe. Ce n’était pas une édition record, mais 533 participants dans 1 salle, c’est un spectacle en soi. Cela a attiré beaucoup de visiteurs chaque jour. Ces 533 sont encore mis en valeur par le fait que chaque plateau a non seulement une étiquette avec son nom mais aussi un drapeau de sa nationalité. Cela s’est avéré utile car j’ai rapidement trouvé ma planche, étant l’un des seuls Belges à camper sur les planches supérieures.
L’inconvénient de faire jouer tout le monde dans un seul groupe est l’énorme différence de niveau entre les joueurs. De 16 grands maîtres dont l’un a un peu moins de 2600 elo à un grand groupe de joueurs sans classement, tous jouant ensemble. Avec les paires accélérées, ils essaient de donner des adversaires plus proches de votre classement, mais j’ai personnellement vu peu ou pas de différence. Depuis 3 éditions (27 parties) déjà, mes adversaires sont soit inférieurs à 2100, soit supérieurs à 2400. Des adversaires équivalents, je n’y arrive jamais.
L’horaire de jeu est également assez inhabituel avec une heure de départ différente à chaque tour. De plus, il y a deux jours avec des doubles rondes. Les parties sont jouées selon le tempo des interclubs belges, soit 40 coups en 90 minutes + 30 minutes pour le repos et 30 secondes d’incrémentation.
Je n’ai pas eu de chance les jours de doubles rondes avec de longues parties à chaque fois. Si tu combines cela avec la préparation également, j’ai même dépassé les 14 heures d’échecs exclusivement sur 1 jour. De plus, lors de la dernière ronde, j’ai dû attendre jusqu’à 16 heures pour commencer mon repas de midi. Une bonne nourriture dans le quartier était de toute façon difficile. Heureusement, les sandwichs de la salle de tournoi ont offert une solution de repli à plusieurs reprises. Le fait que je sois le seul +48 ans dans le top 50 du classement final n’est pas surprenant après une telle usure.
Néanmoins, de tels tournois sont toujours amusants si tu peux jouer avec la bonne compagnie. Après les parties, nous avons dîné plusieurs fois dans un hôtel voisin. Nous avons beaucoup bavardé et ri dans la voiture. Richard Meulders s’est révélé être un excellent conteur d’anecdotes. Une personne à la maison a eu moins de chance, car je n’avais pas pensé au fait que cela signifiait que 3 joueurs de base de la première équipe manquaient pour le 8e tour de l’interclub belge.
Chaque joueur et chaque match d’un tournoi est une histoire en soi. Choisir, c’est perdre, mais le match ci-dessous m’a beaucoup marqué. Ce n’est pas tant à cause du déroulement de la partie mais surtout à cause de l’incroyable talent dont a fait preuve mon adversaire de 11 ans. Je savais à l’avance que Bassam El Zein était le champion de France U12 en titre et il valait mieux ne pas se fier à sa 1981 fide.
Je n’avais pas fait de gaffe nulle part et il m’avait simplement joué sur sa Magnus (une ouverture apparemment faible, un sens positionnel fantastique). C’est la chance et aussi un peu de mes connaissances/techniques de fin de partie qui m’ont permis de sauver le demi-point. Cependant, le fait qu’à la fin il lui restait 1h 32 minutes, soit plus qu’au début, m’a laissé totalement perplexe.
Dans le tournoi de rap qui a suivi, Bassam a tenu en échec le vainqueur de l’open + 2500 fide Boyer Mahel, a gagné contre le grand maître français Gabriel Flom et a également obtenu une nulle contre l’IM français Thomas Dionisi voir les résultats de Bassam rapid CLG. De tels opens laissent souvent entrevoir de futurs grands talents. Cappelle La Grande 2025 a été une autre semaine de plaisirs échiquéens sur et en dehors de l’échiquier.
Helmut Froeyman